Rapport du gouvernement relatif à la motion intitulé « Quelle école en 2030 ? » (N° 1142a)

Madame la Présidente,

Mesdames et Messieurs les députés,

Suite à l’acceptation du postulat cité en titre, le Gouvernement a mandaté un groupe de travail chargé de mener une réflexion sur la situation actuelle de l’école jurassienne et des orientations à définir dans les quinze prochaines années dans le but de répondre de manière pertinente aux évolutions de la société actuelle. Le présent rapport se fonde sur les observations et recommandations du groupe de travail composé de représentants des milieux politique et économique, de la Fédération des parents d’élèves, de la Haute école pédagogique(HEP)-BEJUNE, du Service de la formation secondaire II et tertiaire (SFO), du Service de l’enseignement (SEN), du Syndicat des enseignants jurassiens (SEJ) ainsi que d’enseignants membres du Centre d’émulation informatique jurassien (CEIJ).

En préambule, il convient de rappeler la mission et les buts définis par la loi sur l’école obligatoire (RSJU 410.11) : l’école se doit d’assumer, solidairement avec la famille, l’éducation et l’instruction de l’enfant et de s’efforcer de corriger l’inégalité des chances en matière de réussite scolaire. Elle doit non seulement amener tous les élèves à acquérir des connaissances et des compétences mais également les préparer à devenir des citoyens responsables. Dans l’accomplissement de sa tâche, l’école doit relever un grand nombre de défis. Dès lors, l’étude du postulat « Quelle école en 2030 ? » touche un domaine extrêmement vaste.

L’école met en œuvre un ensemble de mesures destinées à remplir sa mission telles que par exemple la prise en charge des spécificités de chaque élève, l’accompagnement des élèves en difficulté scolaire ou encore l’éducation au développement durable. L’école de demain devra poursuivre et même renforcer ces mesures. Par contre, la révolution fulgurante que connaît notre société dans le domaine des nouvelles technologies nous oblige à reconsidérer les orientations pédagogiques et l’enseignement dans son ensemble. L’éducation dans le domaine des « Medias, Images, Technologies de l’Information et de la Communication » (MITIC) est devenue un enjeu majeur.

Ce changement de paradigme impose de se questionner sur le modèle de l’école tel que nous le connaissons. En 2001, dans son étude sur « L’école de demain ; Quel avenir pour nos écoles ? » 1), l’OCDE soulignait déjà les enjeux de l’école liés aux moyens informatiques et appelait à considérer divers scénarios envisageant l’évolution du système scolaire. Elle proposait six modèles allant du statu quo à une désintégration de la structure scolaire. Bien que datant de plus de quinze ans, cette réflexion reste très actuelle. Au vu des changements imposés par l’utilisation généralisée des moyens informatiques, le système scolaire devrait-il évoluer vers une école « numérisée » où l’apprentissage se ferait au travers de l’ordinateur ? Ou est-ce que le système scolaire, tel que nous le connaissons, répond avec satisfaction aux défis à relever ? Est-il pertinent de mettre à disposition de chaque élève du matériel informatique tel que la tablette numérique ? Est-ce que les contenus du Plan d’études romand (PER) sur l’enseignement des MITIC sont satisfaisants ou devraient-ils être adaptés ?

Orientations stratégiques

Considérant que les buts de l’école doivent favoriser une éducation et un enseignement qui permettent non seulement l’acquisition de connaissances et de compétences, mais également l’intégration sociale des élèves, le modèle actuel de l’organisation scolaire et de l’enseignement est pertinent. La mission qui est attribuée à l’école ne peut être remplie derrière un écran d’ordinateur ou via un réseau informatique. Il est primordial de considérer la classe, les élèves et l’enseignant comme invariants de l’éducation scolaire. L’utilisation du matériel informatique est une plus-value, nécessaire, mais qui ne doit cependant pas être au centre. La technologie se doit d’être présente et développée dans l’enseignement mais dans le cadre de la vie communautaire de la classe. Introduire le numérique en classe ne veut pas dire mettre les enfants devant plus d’écrans. Par contre, un développement des nouvelles technologies dans le cadre de la classe impose à l’enseignant une posture différente ; il n’est plus le dépositaire du savoir mais devient l’animateur permettant à l’élève de devenir l’acteur de ses apprentissages.

Dès lors, les points d’attention doivent se focaliser sur les connaissances et compétences dans le domaine des MITIC des élèves et des enseignants (j’inverserais les deux mots), sur l’infrastructure à disposition des acteurs de l’école et sur les ressources pédagogiques.

Etat des lieux

Mesures mises en œuvre

Dès les premiers développements à large échelle des technologies numériques, au début des années 2000, de nombreuses mesures ont été prises en vue d’adapter l’enseignement.

Au niveau national et romand, la Conférence des directeurs de l’instruction publique (CDIP) ainsi que la Conférence intercantonale de l’instruction publique de la Suisse romande et du Tessin (CIIP) intègrent l’enseignement des MITIC dans leur politique éducationnelle. Ainsi, le PER fixe des objectifs d’apprentissage précis pour les MITIC 2) et prévoit leur utilisation dans l’enseignement de chaque discipline. Les nouveaux moyens d’enseignement édités par la CIIP prennent en compte l’éducation et l’usage des MITIC et promeut les sites internet dédiés à l’enseignement. Une plate-forme réservée aux enseignants met à disposition les guides didactiques en format électronique ainsi que de très nombreuses références pour l’utilisation des MITIC à l’école.

En ce qui concerne la formation initiale des enseignants, la HEP-BEJUNE intègre l’enseignement des MITIC, conformément au PER, dans la didactique des disciplines. Les étudiants sont formés aux technologies de l’information et de la communication pour l’enseignement (TICE). Dans le domaine de la formation continue, une vingtaine de cours sont proposés aux enseignants qui souhaitent développer leurs compétences en informatique.

A mon sens ces affirmations sont légères : des contacts pris avec de jeunes enseignants sortis il y a trois ans de la HEP-BEJUNE vont dans un autre sens. La compréhension de ce paragraphe signifie que toutes les mesures ont été prises par la HEP pour former judicieusement les futurs enseignants-es. Cela me laisse sceptique !

Du point de vue technique, toutes les communes jurassiennes ont équipé les écoles d’ordinateurs et ont installé les connexions internet. Ce parc informatique est en place depuis une quinzaine d’années.

Je dirais que « ce parc informatique a été mis en place depuis une quinzaine et que des démarches viennent d’être entreprises pour que chaque site scolaire soit opérationnel ». Selon M. Yves Froidevaux.

Afin de développer et promouvoir les activités liées aux nouvelles technologies, le Centre d’émulation informatique du Jura (CEIJ), composé d’enseignants particulièrement compétents dans le domaine, développe constamment de multiples activités dédiées aux élèves et aux enseignants. Il gère le site internet du canton Educlasse en étroite collaboration avec ses homologues du canton de Berne francophone. De plus, les écoles disposent d’animateurs MITIC qui fonctionnent en tant qu’enseignants référents à disposition de l’équipe pédagogique pour conseiller, informer ou encore entretenir le parc informatique.

L’enseignement des MITIC est renforcé durant le cursus scolaire par un cours spécifique d’informatique. Ainsi tous les élèves de l’école jurassienne bénéficient de deux leçons hebdomadaires d’informatique en 9e année. Un plan d’études jurassien fixe les objectifs d’apprentissages 3).

Faiblesses identifiées

Bien que la HEP dispense une formation aux TICE dans le cursus de formation initiale des enseignants, on constate dans la pratique quotidienne des enseignants que l’usage des outils informatiques et l’éducation aux MITIC n’est pas systématique et généralisé. On note un manque de formation et de pratique de la part de certains enseignants, et ce, pas toujours parmi les plus anciens. Ainsi, les TICE sont laissés à la libre appréciation des enseignants et on ne peut garantir que les exigences du PER dans ce domaine soient respectées. Il est dès lors possible que des élèves aient parcouru l’entier de leur scolarité en ayant eu soit une abondance soit un manque important d’activités dans ce domaine.

Le « on », c’est qui ? le GT ou nous irait mieux à mon sens

Pour ce qui est du parc informatique et des connexions internet, les équipements n’ont pas été renouvelés d’une manière uniforme sur l’ensemble des écoles. Certaines classes sont équipées de matériel datant d’une quinzaine d’années et certaines écoles ne sont pas relayées de manière performante au réseau internet.

Recommandations

Afin de d’intégrer le numérique dans l’enseignement dans bon nombre de cas, ou de réactualiser, rénover et adapter les moyens actuellement  mis en œuvre, nous proposons de prendre une série de mesures permettant de correspondre aux standards actuels et futurs de la société et d’un enseignement performant dans le domaine numérique.

Les organes nationaux et intercantonaux, CDIP et CIIP, ont entrepris une large réflexion sur les nouvelles orientations à donner et ont déjà décidé de plusieurs mesures propres à prendre en compte l’évolution technologique. L’Etat jurassien se doit de participer à ces travaux et de soutenir les efforts déployés en termes de ressources financières et humaines.

Afin de renforcer l’utilisation des outils numériques en classe pour l’ensemble des enseignants, il s’agira d’envisager les actions suivantes :

Premièrement, les formations de base des enseignants de l’ensemble de la scolarité devraient être renforcées. Ils devraient bénéficier de leçons dédiées uniquement à l’utilisation des TICE. Concernant l’enseignement secondaire I, une branche « informatique » devrait être reconnue au même titre que les disciplines déjà inscrites, comme cela est le cas pour le degré secondaire II. De plus, une formation à la programmation devrait être incluse dans les formations de bases des enseignants de l’ensemble de la scolarité. Il convient de préciser que la programmation consiste à mettre en évidence le raisonnement qui construit un chemin à travers les possibilités pour obtenir un résultat voulu, en utilisant la systématique. Ce n’est pas du codage qui lui, a trait à un langage informatique.

Deuxièmement, il est nécessaire de donner aux enseignants les outils pédagogiques leur permettant de faire évoluer leur pratique de classe. Une offre de cours en formation continue obligatoire traitant de la différenciation dans l’enseignement par du matériel multimédia ou de la pédagogie coopérative par exemple devrait être proposée. En ce qui concerne l’offre actuelle de formation continue dans le domaine MITIC, elle devrait être maintenue.

Troisièmement, il serait bénéfique de promouvoir la formation des enseignants par leurs pairs. Cela pourrait être réalisé par les membres du CEIJ et les animateurs MITIC dans chaque cercle scolaire. Pour que le dispositif soit efficace et performant, il serait nécessaire d’attribuer des ressources en temps, par des leçons d’allégement, et d’assurer des connaissances solides des personnes-ressources, par une formation de niveau CAS.

Ces recommandations en matière de formation des enseignants s’appuient également sur la prise de position de la Chambre HEP du 2 février 2018 4). Cette dernière relève que, dans la perspective de l’introduction d’une branche « Médias et informatique » à l’école primaire, la formation des étudiants dans ce domaine devra être renforcée et développée. Les futurs enseignants devront acquérir toute une série de nouvelles compétences, notamment en programmation.

Pour ce qui est de l’infrastructure, les communes doivent veiller à ce que les écoles disposent de matériel adéquat pour l’utilisation des moyens numériques sans cesse en évolution. La qualité du réseau informatique doit être constante et satisfaisante sur l’ensemble du territoire jurassien. Le responsable informatique du SEN, avec le CEIJ, a bien compris l’importance de l’enjeu et un chargé de mission du CEIJ est mandaté afin d’étudier plus précisément ce problème. Actuellement, plusieurs solutions sont testées.

En conclusion, dans la perspective de répondre aux besoins identifiés ci-dessus en vue d’une adaptation du système scolaire pour une école performante à l’horizon 2030, le Gouvernement envisage les mesures suivantes :

  • contribuer aux travaux des conférences nationales et intercantonales (CDIP et CIIP) en allouant les ressources nécessaires, financières et humaines ;
  • intervenir auprès de la HEP-BEJUNE en vue de consolider la formation initiale des enseignants et de faire reconnaitre la discipline « informatique » pour le degré secondaire I ;

à l’écoute de M. Zuber, lors de la dernière séance interparlementaire de janvier 2018, les formateurs-trices de la HEP-BEJUNE disposent d’importants moyens pour la « recherche ». Pour ma part j’estime qu’il serait important que, dans nos propositions, nous recommandions que la recherche à la HEP soit orientée sur l’introduction du numérique dans l’enseignement des degrés primaire, secondaire I et II)

  • inscrire dans les formations continues du programme jurassien de la HEP-BEJUNE des formations obligatoires spécifiques à l’utilisation des outils numériques et à la gestion de classe dans un environnement numérique ;
  • attribuer aux animateurs MITIC dans les écoles des leçons d’allégement pour leur permettre d’accomplir leur mission de formateurs de terrain, animateurs et responsables MITIC, pour un équivalent de 5 EPT;
  • financer une formation de niveau CAS aux animateurs MITIC ;
  • intervenir régulièrement auprès des responsables des établissements scolaires pour renouveler le parc informatique ;
  • fixer des normes permettant l’harmonisation et les exigences minimales en matière d’équipement des écoles ;
  • soutenir les travaux du CEIJ destinés à améliorer les connexions internet de tous les lieux scolaires.

Au vu de ce qui précède, le Gouvernement considère avoir satisfait aux requêtes de ce postulat qui, en conséquence, peut être classé.

Le Gouvernement vous présente, Madame la Présidente, Mesdames, Messieurs les députés, ses salutations les meilleures.

Delémont, le…

Références :

1) OCDE, Quel avenir pour nos écoles ?, OECD Publications Service, Paris, 2001

2) PER, Formation générale, (FG 11, 21, 31), http://www.plandetudes.ch/web/guest/mitic

3) Plan d’études jurassien « Informatique, 2010 », http://www.jura.ch/DFCS/SEN/Pour-les-enseignants/Plans-d-etudes.html

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