Implantation d’éoliennes dans le Jura (épisode 2)

Il y a quelques semaines, nous nous étions penchés sur la pertinence d’implanter des éoliennes dans le Jura et nous avions conclu que l’apport énergétique de ces installations monumentales ne constituerait qu’une pâle contribution à la production d’électricité en Suisse.

Depuis lors, le débat sur les éoliennes s’est étendu au canton de Neuchâtel où une initiative populaire a été déposée récemment, qui demande que le peuple soit consulté sur la création de parcs éoliens sur les crêtes des montagnes du Jura neuchâtelois.

Dans le canton de Berne, le dossier des éoliennes est bouclé. Le Mont-Crosin a été saccagé par des installations qui tournoient à peine. Le bal des pales hésite entre danse lente et immobilité. A se demander ce qu’elles produisent réellement…

Questions au Grand conseil du canton de Berne

Le Gouvernement bernois, à majorité vert-rouge, a répondu, mercredi 27  octobre 2010, à des interpellations pertinentes sur le thème de l’énergie. Les réponses qui y ont été apportées sont éloquentes et significatives du désarroi que pose indéfiniment l’approvisionnement énergétique par les Forces Motrices Bernoises (FMB). (Le même problème se pose partout dans le monde). A ce stade de l’exposé il est utile de préciser que la Sol E, qui est engagée dans le processus d’implantation des éoliennes dans le Jura,  est une société des FMB dont l’Etat bernois est le principal actionnaire.

Le député Andreas Hofmann, notamment, s’indignait sur le terme de « remplacement » de la centrale nucléaire de Mühleberg, dont la production annuelle est de 350 MW, par une nouvelle installation de 1160 à 1740 MW, soit 3 à 4 fois plus puissante. Si nous ne nous immiscerons pas dans la campagne pour la votation que les citoyennes et les citoyens du canton de Berne auront, à titre consultatif, en février 2011, sur la construction d’une nouvelle centrale nucléaire, nous pouvons, une nouvelle fois, nous interroger sur l’opportunité et  l’utilité de créer de nouvelles implantations de parcs éoliens sur les crêtes du Jura.

Il est fort à parier que, sous l’influence du lobby de l’électricité, une nouvelle centrale nucléaire  sera construite à Mühleberg car on ne voit pas qui acceptera de dresser des centaines d’éoliennes au Gurten, au Stockorn, au Männlichen, sur le Napf, pour ne pas dire sur la Jungfrau !  Quand bien même la consommation en électricité va s’accroître de 15% jusqu’en 2020 et qu’il faudra répondre à cette demande, Mühleberg  devrait produire plus du double des besoins du canton de Berne, indépendamment des approvisionnements par l’énergie hydraulique, les énergies renouvelables modernes, surtout le solaire. A ce propos, le Gouvernement bernois précise, dans une réponse au député du Jura bernois Pierre Amstutz, qu’en 4 ans le solaire a augmenté de 700% et qu’il a dépassé l’éolien en termes de chiffre d’affaires sur le courant vendu par les FMB.

Réfléchir avant d’agir

A l’heure où des décisions cruciales seront prises sur l’avenir énergétique de la Suisse, il serait bon  que les acteurs politiques jurassiens et neuchâtelois tiennent compte désormais de ces nouvelles données. Ironiquement le même député Hofmann ajoutait qu’une concentration aussi importante de ressources à Mühleberg serait catastrophique en cas de panne : « Nous pourrions tous nous retrouver dans le noir ! » En pleine période de haute pression atmosphérique comme nous en avons dans le Jura en été et de janvier à mars, ce ne sont pas les éoliennes qui colmateront les manques cruels en électricité.

Finalement l’équation énergétique constitue un réel nœud gordien.  Et il n’existe pas de solutions simples à des problèmes compliqués. Cependant il est des appréciations dont il faut tenir compte pour évaluer le futur énergétique de la Suisse. Il serait naïf de négliger le pouvoir des producteurs d’électricité, mais aussi des consommateurs. Même si toutes et tous, nous éprouvons une hantise épidermique au nucléaire, il n’en demeure pas moins que, personne, écolos ou non, ne veut sacrifier l’économie, les places de travail, les TV, les ordinateurs, les lampes… et les voitures hybrides par exemple! Notre bien-être dépend étroitement de l’électricité. Oublier cette réalité nous repousse au XIXè siècle !

Avant de connaître les résultats de la votation de l’électorat bernois, ne s’agit-il pas d’imposer un moratoire, tant dans le canton de Neuchâtel que dans le Jura, sur l’implantation  de parcs éoliens ? Nos paysages, notre seule richesse naturelle, méritent un sain respect  et il est encore temps, avant qu’il ne soit trop tard,  de remettre en question les velléités irrespectueuses des développeurs d’éoliennes qui, consciemment, savent qu’ils n’éviteront pas la construction de centrales nucléaires et qu’ils ne résoudront aucun problème en matière approvisionnement en électricité en implantant des éoliennes au rendement très aléatoire.

Source : « Le Journal du Jura », 27.10.2010

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